Paronymie

  • Grec [paronomasia] παρονομασία, de παρά [pará] “à côté [de]” et ὄνομα [ónoma] “nom”, traduit par adnominatio en latin.
    Terme utilisé en grammaire et en rhétorique, qui couvre le sens de antanaclase et de paronymie.

Deux mots sont des paronymes si la différence de leurs signifiants (phonétique ou graphique) est minimale (porte sur une seule lettre) alors que leurs signifiés diffèrent totalement : prise / crise.
La paronymie est une forme élargie d’homonymie.

1. Fallacie d’accent

On distingue, à côté des fallacies d’ambiguïté, une fallacie d’accent, V. Fallacieux 2: Aristote). Dans une langue où l’accent de mot est linguistiquement pertinent (accentuation à l’oral, accent graphique à l’écrit), la différence d’accentuation provoque un changement de la signification du mot ; les deux termes sont, de ce fait, paronymes. Comme la fallacie d’homonymie qui passe d’un sens à un autre le signifiant restant le même, la fallacie d’accent passe d’un sens à un autre avec un changement de signifiant minimal. Tout se passe comme si cette différence entre les signifiants était trop ténue pour discriminer les variations de signification.

2. Paronymie et désorientation du discours

En dialogue, la reprise d’un terme utilisé dans le discours de l’adversaire en lui opposant un terme paronymique brise l’orientation de ce discours, V. Inversion d’orientation ; Destruction :

ce n’est pas une crise de conscience, c’est une prise de conscience.

Le discour politique promouvant les premiers de cordée est déstabilisé par le discours qui lui oppose les premiers de corvée. La pertinence et l’humour de la reprise sont t ici tels que le slogan originel est discrédité. V. Répétition

Dans un discours monolocuteur, la paronymie est un phénomène de cooccurrence, dans un même acte de langage ou une même séquence discursive, de deux termes paronymiques afin d’en rapprocher la signification. La rhétorique utilise les étiquettes de paronomase, adnominatio, astéisme pour désigner ce type de phénomènes.

lenones (marchands d’esclaves) et leones (lions) Quintilien, I. O., 9, 3, 66.

On a affaire à un glissement paronymique lorsque le même discours passe plus ou moins subtilement du thème de la crise de conscience à celui de la prise de conscience.

Ce cas montre l’importance des considérations grammaticales et philologiques présentes dans toute discussion des fallacies liées au discours. L’entreprise critique vise à stabiliser les significations des termes du discours, de considérer “ce qui a été réellement dit”, pour travailler avec un texte exact.

3. Paronymie et interprétation : ne pas varier d’un iota

Comme dans le cas de l’ambiguïté syntaxique, la question de la paronymie peut parfois sembler relever de la bévue ou du jeu de mots. Mais, lorsqu’il s’agit de textes sacrés, la différence peut engager la séparation d’une orthodoxie d’une hétérodoxie.
Lors du Concile de Nicée (325), ce qui deviendra l’orthodoxie catholique soutenait qu’il y a identité de substance entre le Père et le Fils (homoousios). Les Ariens soutenaient qu’il y a similitude de substance entre le Père et le Fils (homoiousios) ; c’est le i, le iota marquant la différence qui fit des seconds des hérétiques.