DÉFINIR LE MOT “ÉMOTION”
Le mot “émotion” est défini comme suit dans le TLFi et dans le Dictionnaire du Français contemporain.
TLFi
Conduite réactive, réflexe, involontaire vécue simultanément au niveau du corps d’une manière plus ou moins violente et affectivement sur le mode du plaisir ou de la douleur. (TLFi, Émotion)
DFC Dictionnaire du français contemporain
Trouble subit, agitation passagère causée par la surprise, la peur, la joie, etc
(DFC, Dubois et al. 1967, Émotion).
Cette définition ne mentionne pas la source de l’émotion, qui est entièrement caractérisée par la façon dont elle affecte l’expérienceur.
- (trouble) subit: la surprise est à l’origine de l’émotion;
- trouble, agitation: l’émotion est caractérisée par une activation, une variation de l’intensité des comportements; c’est un écart par rapport à l’attitude ordinaire.
- (agitation) passagère: l’activation ne se stabilise pas, l’émotion est du côté de l’événement; au terme de l’épisode émotionnel, l’individu retrouve son état de fond ordinaire.
L’émotion est définie comme une réalité physiologique, dont la cause est un état psychologique, „la joie“. La causalité postulée est interne, elle va de la psyché au corps.
L’émotion est un „trouble“, une „agitation“; elle est donc définie comme une variation de type courbe en forme de cloche, sur un fond qui demeure plus ou moins le même.
Une émotion est en somme une ondulation (phasique) sur une ligne de fond (thymique) qui sert de référentiel: c’est une différence qui, sur le plan interactionnel, se manifeste par une variation de l’intensité et de la tonalité de la parole et de l’échange (voir un exemple développé dans Plantin 2012).
Ce „trouble“ et cette „agitation“ sont formatés sémiotiquement.
Le langage associe certaines transformations corporelles à certaines émotions. Il peut s’agir de manifestations d’ordre physiologique accessibles à l’auto-observation (tachychardie, p. ex. fr. le cœur battant), ou à un observateur externe (contraction des muscles érecteurs des poils, p. ex. fr. la chair de poule). Il peut également s’agir d’associations dont on voit mal le substrat physiologique, p. ex. fr. vert de peur, de jalousie, de rage: la couleur verte de l’expérienceur n’est pas forcément très perceptible.
Sur le plan momo-posturo-gestuel, l’émotion s’accompagne de transformations des expressions faciales, posturales et gestuelles, et même d’actions associées: en français, on fait des sauts de joie et pas de tristesse ou de colère; on trépigne de rage ou de joie mais pas de honte.
Comme les situations, les descriptions des personnes peuvent ne comporter aucun terme d’émotion et être orientées vers une émotion. Sur la base de traits descriptifs comme être vert, trépigner, le cœur battant, la chair de poule on peut aller du symptôme à l’émotion, inférer une émotion.
Ces indices peuvent orienter sur un terme d’émotion précis, ou vers une zone émotionnelle, correspondant à une émotion, positive ou négative de faible intensité, que le contexte permettra éventuellement de désigner plus précisément comme de ‘l’irritation’, par exemple. Lorsque l’émotion n’est pas nommée mais reconstruite sur la base d’indices tirés de la sémiotique corporelle, elle sera notée entre crochets, [irritation].
Le rouge lui monta au front: en français, le rouge au front est un trait orientant univoquement vers la honte, du moins pour certains locuteurs; autrement dit, cet énoncé correspond à l’énoncé d’émotion ‘Loc (Lui, [honte])’; dans le cas de cette expression, elle est si univoque qu’elle nomme métonymiquement la honte. Dans d’autres cas, comme Pierre était vert, on a le choix entre la rage, la jalousie, la peur, etc.
Les termes d’émotion (verbes et substantifs) et désignation du syndrome.
Première composante du syndrome émotion, un état mental, psychologique, subjectif, synthétique, conscient.
Une expérience consciente du plaisir déplaisir : l’éprouvé – Un état de conscience spécifique.
En liaison avec cet état interne, l’émotion est définie comme un “sentiment” de peur, de regret, de colère. Elle renvoie ce que Jacques Cosnier appelle parfois “l’éprouvance”, point psychique mystérieux, qui constituerait la réalité ultime d’une émotion décorporalisée. OK, mettre des citation.
Cette composante ne définit pas l’émotion.
La locution “expression corporelle de l’émotion” suppose que l’émotion est définie comme qq chose de “dedans, dans la psychè”, et que le corps l’exprime. Dans la conception ici défendue, c’est le syndrome interactionnel qui la constitue ; ce qui est “dans la psyché” n’en constitue qu’une composante.
VERSION PORTUGAISE DEEPL NON RELUE