ATCCT — La question de la traduction

La question de la traduction

Les pratiques argumentatives dites occidentales sont présentes dans les textes écrits depuis l’aube des civilisations grecque et latine. Les premières théorisations de cette pratique correspondent à la naissance et au développement de la rhétorique et de la logique. L’enseignement du latin et du grec est constitutif de la culture occidentale, les textes originaux sont abondamment traduits et irriguent en permanence la pensée occidentale par une tradition continue de commentaires et de remaniements. À l’intérieur de cette tradition, certaines traductions font date, comme les traductions latines d’Aristote par Guillaume de Moerbeke,

These versions are so faithful to Aristotle’s text that they are authorities on the corrections of the Greek manuscripts, and they enabled Thomas Aquinas to become a supreme interpreter of Aristotle without knowing Greek.
Allan Bloom, « Preface » to his translation of Plato’s Republic, 1968, p. xi.

 

Quoi qu’il en soit de tels sommets, le lecteur illiteratus intéressé peut facilement obtenir des traductions fiables de nombreux textes classiques chinois. Le prix à payer est que, à proprement parler, ces traductions ne permettent pas d’étudier “l’argumentation dans les textes classiques chinois”, ni “telle argumentation dans les Analectes de Confucius”, mais seulement “telle argumentation dans telle traduction des Analectes de Confucius”[1] c’est-à-dire “tel passage où le traducteur a rendu le passage chinois correspondant par une argumentation”. Parler de “la traduction d’une argumentation”, suppose qu’on est capable d’identifier quelque chose comme une argumentation en chinois. Mais le traducteur confirmé peut parler ainsi, et on ne voit pas quel soupçon universel a priori pourrait peser sur la qualité de la traduction. Pour les grandes œuvres, plusieurs traductions d’un même texte sont disponibles. L’illiteratus peut seulement considérer que ces différentes traductions d’un même passage expriment des lectures différentes de raisonnements différents.

Notre critère de choix des passages est subjectif. Nous nous limiterons aux traductions que nous avons l’impression de comprendre. Si la traduction du passage considéré reste obscure, il faut se résigner à renvoyer ce passage à plus tard ; c’est aussi parfois le cas pour certains textes dans la langue et la culture de l’analyste.

Si plusieurs traductions sont disponibles et équivalentes, on peut penser que ces traductions sont fiables. La question de savoir si elles transmettent quelque chose de la saveur et du parfum authentiques du texte original est réservée aux spécialistes.

Le paragraphe suivant sur l’analogie propose un exemple de telles traductions stables et compréhensibles

 

 

 


Some translations are epochal, such as William of Moerbeke’s Latin translations of Aristotle:

 

These versions are so faithful to Aristotle’s text that they are authorities on the corrections of the Greek manuscripts, and they enabled Thomas Aquinas to become a supreme interpreter of Aristotle without knowing Greek.

Allan Bloom, « Preface » to his translation of Plato’s Republic, 1968, p. xi.

 

Without systematically aspiring to such heights, the interested reader can easily obtain reliable translations of many classical Chinese texts.  The price to be paid is that, strictly speaking, this illiterate reader cannot study « argument in Chinese (classical texts) », « such and such an argument in the Analects of Confucius », but only « such and such an argument in such and such a translation in the Analects of Confucius ». If necessary, the reference to « Eno’s translation of the Analects of Confucius” can be abbreviated as: “AnalectsEno” with the translator’s name in subscript.

In the case of major titles, several translations of the same text are available, which makes it possible to to identify their differences and similarities, if necessary. In this case, one should consider that the different translations of the same passage express different readings, different ways of reasoning.

Sometimes, the translation(s) of the passages remain unclear or incompatible. In this case, comments can be left for a better future or for better readers. After all, this is also the case for texts in the analyst’s own language and culture.