ANTITHÈSE
L’antithèse met en parallèle deux contenus opposés. Elle peut consister en une simple juxtaposition de mots antonymes “riches / pauvres”, et se développer jusqu’à des tableaux contrastés opposant les vies des puissants aux vies des humbles.
1. Antithèse et diptyque argumentatif
La situation argumentative émerge avec le constat d’un point de confrontation ratifié comme tel, une stase. Elle se développe en un diptyque, constitué par la confrontation de deux schématisations, c’est-à-dire deux descriptions–narrations des faits d’orientations opposées, appuyant des conclusions opposées. À ce niveau, le dialogue peut parfaitement se réduire à un “dialogue de sourds”, où rien du discours de l’un ne se fait entendre dans le discours de l’autre. Ce type de situation argumentative élémentaire correspond à l’antithèse dialogale
La confrontation peut être reprise en un monologue structuré juxtaposant les deux volets de ce diptyque. L’antithèse monologale ainsi créée met en scène une antiphonie, deux voix tenant des discours incompatibles sur un même thème. C’est typiquement le cas de la délibération intérieure, où le locuteur se situe dans la position du tiers, de celui qui va et vient d’une position à l’autre, V. Question délibérative.
L’antithèse monologale peut exprimer une opposition de type dilemme ou opposition-et :
J’admire ton courage et je plains ta jeunesse. (Corneille, Le Cid 2, 2, v. 43 [1]
Lorsque le locuteur s’identifie clairement à l’un des deux énonciateurs, l’équilibre des deux voix est rompu en faveur d’une des positions, qui l’emporte sur l’autre. On a affaire à une opposition-mais, ouverte sur un dépassement de l’antithèse :
… mais je plains ta jeunesse, je ne répondrai pas à tes provocations.
2. L’antithèse, figure et argument
Un discours comme le suivant correspond à une argumentation complète structurée par le topos des contraires,
C’est quelqu’un de soumis aux forts, je n’aimerais pas me retrouver face à lui en position de faiblesse. D1
Il en va de même pour la description auto-argumentée :
Il est soumis avec les forts et dur avec les faibles. D2
Alors que, dans D1, “dur avec les faibles”, le second membre du topos, reste sous-entendu, D2 correspond à une actualisation complète du topos. Mais les deux discours reposent sur les mêmes mécanismes : l’argumentation est “valide” dans la mesure où le portrait est “vrai” ; l’un et l’autre sont “convaincants”.
Les ressorts de la description et de l’argumentation, de la figure et de l’argument sont les mêmes.
[1] Cité dans Lausberg [1960], § 796.