F Oxymore

Oxymore

Wuttke, Walter 1977. Zu Fragen des Zustandekommens potentieller sprachlicher Wirkingen des Oxymoron… Beiträge zur Geschischte des deutschen Sprache und Literature, 98. 83-90


Des emplois récents du mot oxymore lui-même illustrent de façon frappante cette ambivalence pragmatique de la figure. Lors de la constitution de mon corpus, j’ai en effet été frappée de constater que ce terme savant, peu usité dans les manuels de rhétorique eux-mêmes jusqu’à une date récente, s’était suffisamment répandu dans l’usage courant pour apparaître dans des commentaires métalinguistiques à forte orientation argumentative, de sorte qu’on peut parler de jugement d’oxymorisation, comme A. Krieg-Planque (2004) parle de jugement d’euphémisation.

57 Qualifier tel objet de discours d’oxymore devient alors un acte argumentatif décisif, soit pour disqualifier l’objet de discours ou le locuteur qui l’a désigné ainsi, soit au contraire pour les parer de toutes les vertus. C’est ainsi que le syntagme « TVA sociale » se voit dans des échanges récents sur la Toile (mai 2007) qualifier d’oxymore par les détracteurs de l’impôt ainsi désigné afin de montrer la fausseté du caractère social de cet impôt. Une blogueuse voit même dans l’oxymore une tare du discours politique contemporain :

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(29) C’est ainsi que depuis une dizaine d’années on voit fleurir dans la sphère politico-économique d’aussi brillants oxymores que la « croissance zéro » pour éviter de dire la stagnation, le « développement durable » pour taire toute notion de consommation prudente, la « discrimination positive » ou encore le « libéralisme raisonné » pour faire passer la pilule, quand il ne s’agit pas tout bonnement de nous faire croire à l’impossible avec des expressions comme la « guerre propre » et ses fameuses « frappes chirurgicales ». (Article publié sur Agoravox dans l’édition du 04/12/2006, http:// wwww. agoravox. fr/ article. php3 ? id_article= 16263)[29][29]On peut noter que les exemples cités, hormis « discrimination…

 

59 Dans les débats à l’Assemblée Nationale sur le Traité Constitutionnel Européen, l’expression de « traité constitutionnel » est qualifiée d’oxymore par les défenseurs de ce traité, qui parviendrait selon eux à ménager les prérogatives des États tout en approfondissant la construction de l’unité européenne, alors que, quatre ans auparavant, l’appellation d’ « oxymore » est utilisée pour critiquer le concept de « fédération d’États-Nations » qui masquerait tout bonnement une conception fédéraliste de l’Union européenne :

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(30) M. Léonetti. Contrairement à ce que certains prétendent en arguant du terme de Constitution, ce nouveau traité ne fait pas de l’Union européenne un super-État. C’est un traité entre États. Pascal Clément a brillamment expliqué comment l’expression de traité constitutionnel faisait coïncider deux concepts a priori contradictoires, mais synthétisés dans la notion de construction européenne. – M. Pascal Clément, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, rapporteur. Un oxymore ! (première séance du 26/01/2005)
(31) M. Jean-Pierre Chevènement. À rien ne sert de se réfugier, Monsieur le ministre des affaires étrangères, dans les oxymores, du type « fédération d’États-nations » ; c’est d’avance concéder à la logique du super Etat fédéral. (deuxième séance du 5/06/2001)