Contre-

Le préfixe prépositionnel contre- sert à former une série de mots très utilisés en argumentation.

1. Contre-accusation

La contre-accusation est une stratégie stasique qui produit une nouvelle situation argumentative en inversant les rôles d’accusateur et d’accusé et mettant l’accusateur sur la défensive.

1. Discours, Contre-discours
Proposition, Contre-proposition

Les notions de Discours (D) et de Contre-Discours (CD) sont corrélatives : D et CD sont produits dans le champ d’une même question argumentative, QA, à laquelle ils proposent des réponses différentes.

Le CD est second par rapport au discours D . Il a le statut de second tour de parole en réaction au premier tour de parole que constitue le discours D.
D présente des arguments ArgX soutenant la proposition PX en réponse à la QA.
—Le CD est réactif et critique ; il ne ratifie pas D et s’efforce montrer par diverses manœuvres que PD doit être transformée ou rejetée. Pour cela, il s’en prend à tous les constituants du discours D, tout en focalisant sur le rejet de ses arguments et conclusions.
Cette réaction  s’appuie sur des arguments positifs ArgY soutenant la contre-proposition PY en réponse à la QA (voir infra)

Défini comme un discours d’opposition, discours minoritaire qui ne dispose pas des leviers du pouvoir, le contre-discours se distingue du discours non par sa structure (les deux contiennent des éléments positifs et négatifs), mais par le fait qu’il supporte la charge de la preuve.

2. Contre-argument, contre-argumentation

On peut distinguer deux types de contre-arguments CA et de contre-argumentation, les CA structurels et les CA contextuels.

2.1 Contre-arguments et contre-argumentation structurels

Le CD peut
Tenter de détruire le discours D, par exemple en le ridiculisant, V. Mépris.
Présenter des contre-argumentations structurelles à l’argumentation avancée par D, soit en présentant des objections visant à modifier PX, soit en réfutant les argumentations ArgX.

2.1 Contre-arguments et contre-argumentation contextuels

Sous la même QA, peut se développer d’une part, un discours D qui développe la proposition P, et d’autre part, un discours D’ qui réfléchit au même problème selon d’autres critères, et lui trouve une solution P’, différente de P, en s’appuyant sur des arguments et des argumentations Arg’ en s’abstenant systématiquement de mentionner D.
D’
est simplement un discours autre qui choisit de ne pas mentionner le discours concurrent, mais de se concentrer sur la construction de sa propre position.
Une telle stratégie fortement assertive permet de focaliser positivement l’intervention, elle évite les paradoxes de la réfutation, mais peut être considérée comme une forme de mépris des arguments avancés par une partie adverse, “même pas digne d’une réfutation”.

Les deux discours D et D’ peuvent en théorie se développer en parallèle, sur le mode de la coexistence pacifique, V. Antithèse

Toutefois, D’ prend automatiquement valeur de CD lorsqu’il est mis en rapport avec D dans l’espace discursif qui les fonde, celui de la QA.
Par le jeu de la négation en situation polarisée, le fait de fournir une raison de faire B, incompatible avec A, se transforme en raison de ne pas faire A. L’argumentation en faveur de B est une contribution à la réfutation de A (Brandt & Apothéloz 1991, p. 98-99).
Les arguments positifs qui soutiennent D’ peuvent être désignés, relativement à D, comme des contre-arguments contextuels c’est-à-dire “des arguments qui défendent une proposition autre”.

V. Contradiction ; Antithèse ; Paradoxe.

3. L’asymétrie Proposition (D) vs Contre-proposition (CD)

3.1 Deux discours en équilibre (stase)

Lorsque le dialogue argumentatif est engagé, particulièrement lorsque la QA a une longue histoire, les deux discours en présence combinent en miroir deux types d’opérations

    • Travail négatif de rejet de l’autre discours.
    • Travail positif de construction d’une proposition autre.

Le discours X présente : 

Une proposition, PX
Une argumentation positive arguments structurels de X, en faveur de PX
qui fonctionnent contextuellement comme des contre-(ArgY)
Une argumentation réfutative des contre-(ArgY), soit des arguments réfutant les arguments et l’argumentation propres du contre-discours

Le discours Y présente : 

Une proposition, PY
Une argumentation positive arguments structurels de Y, en faveur de PY
qui fonctionnent contextuellement comme des contre-(ArgX)
Une argumentation réfutative des contre-(ArgX), c’est-à-dire des arguments réfutant les arguments et l’argumentation propres de X

Dans ce cas, les notions de contre-discours et de discours sont relatives; X est le contre-discours de Y et Y le contre-discours de X.

3.2 La charge de la preuve rompt l’équilibre

Sous une QA concrète, cette symétrie est rompue par la charge de la preuve, qui bride l’un ou l’autre discours.
On peut alors parler, dans l’absolu, de discours et de contre discours. Si Y supporte la charge de la preuve, il est dans l’absolu, contre-discours de X.