Présentation
Le laboratoire « Interactions, Corpus, Apprentissages et Représentations » (ICAR) peut compter sur le soutien de ses tutelles locales, l’ENS de Lyon et l’Université Lumière Lyon 2, et sur l’association avec le CNRS, ce qui lui garantit le statut d’Unité Mixte de Recherche (UMR 5191). Il est structuré en trois équipes, qui représentent des orientations disciplinaires, et en deux axes transversaux qui traitent de domaines thématiques qui sollicitent des approches transdisciplinaires.
Le laboratoire peut s’appuyer sur un héritage de 20 ans de recherches qui interprètent les sciences du langage de manière originale, en les plaçant à l’interface avec les sciences de l’éducation et les humanités numériques. Ceci a amené notre unité de recherche à se spécialiser, d’une part, dans l’étude des usages linguistiques, aussi bien dans la production écrite qu’orale, et, d’autre part, dans la prise en compte des nouveaux médias numériques, tant au niveau des contextes et des supports utilisés par les pratiques linguistiques, qu’au niveau des méthodes d’analyse de corpus (linguistique outillée).
En étudiant les relations entre l’appropriation subjective de la langue et le partage collectif d’objectifs et de valeurs à travers des formes d’argumentation et d’interaction, le laboratoire ICAR centre ses investigations sur les formes de médiation linguistique de la connaissance, qu’elle soit discursive (connaissances sur les langages et les textualités), réflexive (apprentissage) ou gnoséologique (connaissances disciplinaires). C’est à partir de cette focalisation sur la médiation des savoirs et sur leur actualisation dans les échanges oraux et écrits que le projet scientifique de l’unité parvient à fédérer les fondements des sciences du langage (syntaxe, sémantique, pragmatique), les approches interactionnelles et discursives (linguistique interactionnelle, analyse du discours, sémiotique, sociologiques, interactionnelles) et les didactiques (des langues et des sciences).
En valorisant la complexité des pratiques langagières en couplage avec leur environnement, les expertises réalisées par notre UMR privilégient le respect de la dimension multimodale des interactions et la variété sémiotique des ressources mobilisées, le caractère situé ou historicisé des attestations, l’implication d’une dimension cognitive et incarnée des énonciations. Pour réaliser ces objectifs scientifiques, le laboratoire a développé des services d’appui à la recherche qui permettent à la fois des attestations caractérisées par une densité maximale de données (captations audiovisuelles multicaméras, même avec dispositifs à 360°) et un traitement informatique qui articule analyse quantitative et analyse qualitative, distant reading et close reading.
Une complémentarité entre les approches emic et approches etic
Si l’on veut faire émerger un caractère distinctif d’ICAR, on peut le repérer dans la recherche d’une complémentarité de perspectives, point de départ incontournable pour embrasser une vocation transdisciplinaire. C’est le cas dans notre quête d’une articulation féconde entre les approches etic, à la recherche d’un point de vue généralisant à même de reconnaître des grammaires et homologies, et les approches emic, visant à privilégier un point de vue interne et participatif par rapport aux pratiques linguistiques étudiées, afin de dégager une intelligence stratégique et une créativité diffuse. En ce sens, nous estimons pouvoir construire un cercle vertueux entre l’enrichissement progressif de nos cadres épistémologiques et les fruits heuristiques de nos analyses, entre savoirs théoriques et savoirs de terrain.
L’assurance du caractère productif de ce cercle vertueux peut être fondée sur la mise en tension des aperçus théoriques face à des objets, à des corpus, à des domaines d’investigations suffisamment éloignés. Ce n’est pas un hasard si notre laboratoire s’est spécialisé dans la médiation des savoirs validés par les institutions, en premier lieu pédagogiques et scientifiques, pour ensuite aborder, d’une part, des contextes où ces savoirs sont suspendus ou projetés dans un cadre fictionnel (activités ludiques, pratiques artistiques), et d’autre part, des scénarios sociaux problématiques où les savoirs des interactants semblent clairement faire défaut (contextes qui se caractérisent par un accès problématique à l’éducation ou qui sont liés à l’émigration, à la maladie, au partage d’expériences traumatiques). Les langues favorisent à la fois la codification et la procéduralisation, ainsi que l’adaptation aux expériences d’émancipation créative (jeu) ou de vulnérabilité sociale et individuelle.
Contre toute idéalisation préalable de l’objet d’étude, ICAR veut prendre en compte l’hétérogénéité des manifestations discursives, le caractère composite et polysémiotique des corpus, la coprésence des langues et les phénomènes de code-switching, l’hybridité des supports de formations, la variété de valeurs épistémiques qui traverse et module les apprentissages et la négociation des connaissances en contexte didactique.
Un savoir-faire reconnu dans la constitution de corpus
Le laboratoire ICAR est connu pour la richesse de ses corpus, enregistrés en vidéo et audio, d’interactions sociales en “milieu naturel” – que ce soit dans la vie quotidienne, en situation professionnelle ou en contexte éducatif. Il est connu aussi pour la richesse et l’originalité des matériaux écrits et textuels, comme par les corpus des manuscrits sub-sahariens. Ces corpus, toutefois, ne sont pas seulement rassemblés, stockés, annotés de manière soignée ; ils sont concrètement étudiés, en donnant lieu à des publications de référence, et par la suite réexploiter ultérieurement dans le cadre de nouveaux projets de recherche. Nous pouvons faire l’exemple de la banque de données CLAPI (Corpus de LAngue Parlée en Interaction) compte des centaines d’heures d’enregistrements vidéo et audio transcrits, documentant les situations d’usage du langage les plus diverses, au travail, en famille, dans les institutions, dans des contextes ordinaires et des milieux spécialisés. Ou encore nous pouvons mentionner la base de vidéos VISA (VIdéos de Situations d’enseignement et d’Apprentissage) recueille des centaines d’heures de classe permettant une analyse détaillée, longitudinale et comparée des pratiques d’enseignement et d’apprentissage.