Vandeloise (1988) a montré que les usages spatiaux statiques de la préposition
à obéissent à deux règles. La première (A1) subsume ses usages de « localisation », la seconde (A2) ceux de « routine sociale ».Al : «
x est à y » si
y localise
x.
A2 : «
x est à y » si les positions de
x et
y sont associées dans une routine évoquée par
y.C’est à ce second type que nous nous intéresserons, où des rituels sociaux sont évoqués par un site. Par exemple :
(1)
Marie est au volant
(2)
Max est au piano
(3)
Césarine est à la fenêtre
Après une présentation cursive des travaux relatifs à l’expression de la routine sociale qui ont suivi (et précédé) l’article de Vandeloise, nous nous emploierons à déterminer dans quelle mesure certains emplois de la préposition
en, lorsqu’elle a pour complément des noms désignant des lieux, des entités mixtes ou des objets (Aurnague, Hickmann & Vieu, 2005), relèvent aussi d’une approche en termes de « routine sociale ».
Nous restreindrons notre étude à la structure
x être en y. Après avoir rappelé le déplacement progressif du « centre de gravité » des usages de
en depuis le XVIe. s. (Gougenheim, 1950 [1970]; De Mulder, 2008), nous comparerons les effets de sens des deux prépositions en partant de paires telles que :
(4)
Max est à la mer / en mer
(5)
Max est à l’usine / en usine
(6)
Max est au fauteuil / en fauteuil
Nous nous interrogerons sur la dimension souvent plus technique voire professionnelle des rituels sociaux associés au NSite et sélectionnés par
en (fait déjà observé par Corblin 2012). Nous enchaînerons sur les processus de conventionnalisation à l’œuvre, en montrant que dans le cas de
en, tout porte à croire que certains sont en cours d’élaboration dans diverses sphères professionnelles.
Bibliographie indicative
Aurnague, M. (2004). Les structures de l’espace linguistique : regards croisés sur quelques constructions spatiales du basque et du français. Peeters, Leuven.
Aurnague, M. (2012). Quand la routine s’installe : remarques sur les emplois de à de type « routine sociale ». Revue Romane, 47:2, pp. 189-218.
Aurnague, M. (2015). Pourquoi l’on n’est pas ’à la flûte’ comme l’on est ’au piano’ : (encore) une note sur ’à’ de type ”routine sociale”. hal-02632371f
Aurnague, M., Hickmann, M. & L. Vieu, (2005). « Les entités spatiales dans la langue : étude descriptive, formelle et expérimentale de la catégorisation », in Thinus-Blanc C. & Bullier, J.
Agir dans l’espace, Cognitique, 217-232.
Corblin, F. (2012). Locus et telos : aller à l’école, être à la plage. Corela, n° thématique (Expression(s) de l’espace en français, Fagard B. & D. Stosic (eds)),
http://corela.edel.univ-poitiers.fr/index.php?id=2722
Leeman, D. (1997) « Sur la préposition en »,
Faits de langues, 9, 135-145.
Leeman, D. (1998),
Les Circonstants en question(s), Paris, Kimé.