Opposition, Figures d’—

1. Une liste

La rhétorique des figures propose un ensemble très riche de notions et d’observations sur le thème de l’opposition discours / contre-discours, fondamental dans la situation argumentative ; les figures suivantes renvoient, à divers titres, à la confrontation dialogale comme à sa représentation dans le discours monologué :

annomination V. Paronymie

adynaton V. Maximisation

antanaclase V. Inversion d’orientation

antéoccupation V. Prolepse

antimétabole  V. Inversion d’orientation

antiparastase  V. Inversion d’orientation;

antithèse

apodioxis V. Mépris

astéisme V. Paronymie

contraires

dilemme

distinguo

dubitation V. Question argumentative

énantiose V. Désaccord

épitrope

euphémisme V. Maximisation

hypobole V. Prolepse

interrogation V. Question argumentative ;
Question rhétorique

ironie

oxymore V. Non Contradiction

métathèse V. Prolepse

paradiastole V. Inversion d’orientation

préocccupation V. Prolepse

procatalepsis V. Prolepse

prolepse

subjection V. Question argumentative

Cette liste, certainement redondante et non exhaustive, est proposée dans l’ordre alphabétique. Chacun de ces termes n’apparaît pas forcément dans toutes les typologies des figures, et si un terme apparaît dans une typologie, il peut y occuper des positions très différentes, en fonction des principes de classement adoptés. En outre, dans chaque typologie « chaque catégorie de figure est définie par son marquage dominant, tout en présentant des traits secondaires non négligeables » (Bonhomme 1998, p. 14), qui seront peut-être mis en avant dans une autre typologie. Chacun de ces classements a sa logique, et chacune de ces logiques a ses limites.

2. Un regroupement

La même observation s’applique au regroupement suivant, qui se propose d’ordonner schématiquement quelques figures de la contradiction dialogique, en les rapportant aux moments clés du développement de la situation argumentative. Ce procédé permet également d’évoquer, par attraction, d’autres figures possibles, principalement celles qui ont trait au traitement monologique de la question, et quelques figures qui apparaissent au terme du développement du processus argumentatif.

Ouvrir une situation argumentative
— V. Désaccord

S’approprier la question
Le locuteur s’approprie la question pour la traiter monologiquement par des figures dites de communication, interrogation (interrogatio), subjection (subjectio), dubitation (dubitatio).
V. Question argumentative

Invalider le discours opposé
Dans les figures d’invalidation du discours, l’argument présenté ou la position construite par l’interlocuteur ne sont pas entendus dans leur orientation originelle, ni, a fortiori, repris dans le discours du locuteur. Le discours contraire ou contrariant est rejeté en bloc, par des évaluations visant à :

Le détruire, notamment sur la base d’un défaut langagier.
— Le ridiculiser,

Désorienter le discours opposé
Une série de figures de déstabilisation visent moins à réorienter, qu’à désorienter le discours contraire. On utilise les mots de l’opposant pour leur faire dire le contraire de ce qu’ils disent : “ton discours, tes mots te réfutent” : antanaclase ; antimétabole.

Objecter, Concéder, Réfuter
Il est extrêmement difficile pour un argument de pénétrer le discours de l’autre. Il ne suffit pas qu’un argument soit dit, qu’un point de vue soit exprimé, il faut encore qu’il soit entendu et repris, même pour être réfuté ou déformé ; ces actes, pour négatifs qu’ils puissent paraître, marquent en fait l’émergence de la collaboration argumentative. Les formes suivantes intègrent des éléments du discours de l’autre :

— Intégration partielle, V. Distinguo ; Dissociation
— Intégration à des fins de réfutation, après reprise et reformatage :
antéoccupation (prolepse, hypobole) métathèse, V. Réfutation, Épitrope, Objection.
— Réfutation faible correspondant en pratique à une confirmation : V. Réfutation, Paradoxe, Prolepse.

Ces figures peuvent être mises en relation systématique avec diverses facettes du développement des situations argumentatives. Elles correspondent à des moments stratégiques de l’argumentation dialoguée. Elles sont de claires manifestations d’une argumentation qui opère par confrontation directe des points de vue en compétition, avant même l’apparition des arguments.

Du point de vue des théories critiques, promouvant l’enrégimentement des argumentations attestées sous des critères éthiques ou rationnels, on considérera probablement que certaines de ces manœuvres sont fallacieuses, ce qui ne fait que renforcer la nécessité première de les situer et de les décrire : avant de juger, il faut comprendre.